Collection CEUX D’EN BAS
« Si le mouvement a été si mal conduit du 18 mars au 28 mai, c’est qu’il a eu pour chefs des hommes qui, sauf de rares exceptions, n’ont jamais rêvé semblable situation ; ils en ont été pour la plupart ahuris ou affolés. […] La Commune avait besoin d’administrateurs ; elle regorgeait de gouvernants. […] La Commune a été violente et faible. Elle devait être radicale et forte. »
Il est deux manières de commémorer des événements historiques. L’une consiste à évoquer les morts glorieux, à célébrer pieusement ou tapageusement leur souvenir. L’autre les érige en témoins et juges d’un monde qui n’a pas su réaliser leurs espérances.
Chef du personnel de l’administration de Paris, délégué aux Services publics de la Commune, Jules Andrieu (1838-1884) était un homme paradoxal : fonctionnaire froid et méthodique, épris de justice et de poésie, ami de Varlin et de Verlaine.
Dans ces Notes rédigées en 1871, il relate la façon dont il a veillé à déjouer la « machine de guerre que le gouvernement de Versailles préparait, celle dont l’effet lui paraissait le plus certain, la brusque interruption des services publics ». Il nous introduit au cœur de la besogne anonyme de ceux qui permirent à la Commune de s’écrire au quotidien en assurant la survie matérielle de la cité : acheminement de l’eau, éclairage, organisation des cimetières, entretien des égouts...
Mais Andrieu ne s’en tient pas à cela. Il rédige un « manuel pratique des fautes » de la Commune, véritable réquisitoire, parce que la révolution n’est pas morte et qu’il faut analyser « courageusement » les échecs si l’on veut parvenir un jour au rêve des communeux : la république sociale, universelle, libre, juste et fraternelle. Une Commune sans mythe.