« En un sens, la vie quotidienne, c’est ce qu’il y a de plus simple, de plus évident. Comment vit-on ? S’il est difficile de répondre, la question n’en est pas moins claire. En un autre sens, c’est ce qu’il y a de plus insaisissable, de plus difficile à cerner et à déterminer. En un sens, rien de plus superficiel : c’est la banalité, la trivialité, le répétitif. En un autre sens, rien de plus profond. C’est l’existence et le « vécu » non transcrits spéculativement, dévoilés : ce qu’il faut changer et ce qu’il y a de plus difficile à changer. »
En 1947, Henri Lefebvre publie le premier volume de sa Critique de la vie quotidienne, projet qu’il poursuit avec deux autres volumes en 1961 et 1981. Durant plus de trente ans, le philosophe cherche à répondre à cette question d’apparence simple : comment vit-on ? Face à une transformation accélérée des modes de vie, au développement des villes nouvelles, au sacrifice des familles prolétaires pour accéder à l’électroménager dans les années 1950 ou à l’ambivalence du capitalisme qui facilite certaines vies tout en ravageant le monde, le projet évolue et change, déviant des chemins annoncés mais cherchant toujours à comprendre l’aliénation à l’œuvre au quotidien.
Rédigé à la naissance du consumérisme d’après-guerre, ce grand texte a marqué la jeunesse révolutionnaire en France et reçu un écho considérable à l’étranger, influençant la constitution des études culturelles. Pour la première fois en un seul volume, cette nouvelle édition de la Critique de la vie quotidienne redonne à lire les interrogations d’une figure majeure du marxisme français hétérodoxe.
Cette édition intégrale contient : vol. I : Introduction (1947), vol. II : Fondements d’une sociologie de la quotidienneté (1961), vol. III : De la modernité au modernisme (1981).
Préface de Kristin Ross.
Henri Lefebvre (1901-1991) est un philosophe et sociologue français. Dès les années 1930, il a largement contribué à diffuser le marxisme en France. Résistant de la première heure, son rejet sans concession du stalinisme, lui vaut d’être exclu du PCF en 1958. En 1962, il devient professeur de sociologie à l’Université de Strasbourg, puis à Université de Paris X-Nanterre de 1965 à 1968. Sa pensée a influencé de nombreuses disciplines, dont l’urbanisme et la géographie. Toute son œuvre s’attache à défendre l’appropriation de son environnement par chacun comme outil d’émancipation.