À en croire l’opinion courante, Marx et le marxisme se situent du côté d’une modernité prométhéenne, anthropocentrée et ne considèrent la nature que pour mieux la dominer et l’exploiter, selon une logique productiviste qui fut historiquement celle du capitalisme et du socialisme.
L’écologie, comme discipline scientifique et comme politique, devrait ainsi se construire en rupture avec l’héritage marxiste ou, au mieux, en amendant celui-ci considérablement pour le rendre compatible avec des préoccupations qui lui étaient fondamentalement étrangères.
Qu’en est-il vraiment ? John Bellamy Foster montre, textes à l’appui, que ces représentations constituent sinon une falsification, du moins une radicale distorsion de la réalité : des textes de jeunesse aux écrits de la maturité, inspirés par les travaux de Charles Darwin et de Justus von Liebig, grand chimiste allemand et fondateur de l’agriculture industrielle, Marx n’a jamais cessé de penser ensemble l’histoire naturelle et l’histoire humaine.
S’il faut aujourd’hui tirer de l’oubli la tradition marxiste et socialiste de l’écologie politique, c’est que la perspective marxienne en la matière possède une actualité brûlante : l’une des questions les plus urgentes n’est-elle pas de savoir si la crise écologique est soluble dans le capitalisme ?
John Bellamy Foster est, avec Barry Commoner, James O’Connor et Joel Kovel, une des figures les plus importantes de l’écosocialisme aux USA. Il enseigne la sociologie à l’université de l’Oregon et dirige depuis 2000 la prestigieuse Monthly Review.