Là, rien n’est policé par une quelconque mise à distance ou à l’abri, pas plus que par les empreintes de l’histoire : tout est au fond livré au vent, qui fait également courir les herbes et les nuages, et qui fait galoper le temps sur les croupes longues des montagnes rabotées par l’âge. Aucun obstacle à son souffle, sinon quelques forêts de hêtres, mais loin de l’arrêter, elles lui servent de bouche de relance et de porte-voix. Qui a écouté le vent d’hiver ameuter tous les horizons sait à jamais que sous la vie, il y a des régions secrètes dont rien ne permet de conclure si elles sont une menace ou bien si, à la manière des caves, elles abritent des provisions d’avenir.
Bernard Noël, bâtisseur d’une œuvre considérable et mondialement estimée, est né en 1930 dans l’Aveyron et a vécu en Aubrac jusqu’à la vingtaine. Il brosse ici le portrait du terroir chéri : un patrimoine rural, riche en savoir-faire, qui se dresse dans des paysages à la flore luxuriante. Entre le basalte des burons et le surgissement des ruisseaux se racontent le quotidien agricole et la nature jaillissante. Chaque pas dans ces mémoires aubraciennes interroge l’enracinement des hommes jusqu’au temps lui même : voici une ode aux souvenirs.
1000 exemplaires sur papier vélin ivoire de Sainte Geneviève sur Argence.