Accueil > Commune de Paris (et d’ailleurs) > Souvenirs d’un étudiant pauvre

Souvenirs d’un étudiant pauvre

Jules Vallès

samedi 30 mai 2015

Couverture : Tardi

« Je fis connaissance, pendant ces visites à la Sorbonne, de quelques individus qui y venaient régulièrement à chaque session, et qui, à chaque session, étaient refusés, mais s’en allaient joyeux, contents, se félicitant, se congratulant, se tapant sur le ventre, donnant en un mot les signes de la plus vive satisfaction, et allant se griser comme des Polonais avec des femmes de gorge pesante mais de mœurs légères ! Il y en avait d’assez jeunes – la plupart étaient vieux.
L’un d’eux, à qui je parlais de mes deux retoquages, me dit :

- Moi, j’ai été refusé sept fois, et je compte bien l’être sept fois encore, et même plus, n’est-ce pas, Baron ?

C’était un soir de noce dans un café où j’allais depuis quelque temps, pour les entendre parler bachot, et parce qu’ils m’intriguaient, ces blackboulés si gaiement résignés, qui étaient toujours suivis de jeunes gens dont la bourse se vidait sur la table, tout le monde se serrant les mains et trinquant : “Aux vieux melons de la Sorbonne !” »

Du 8 janvier au 5 mars 1884, malade et de retour d’exil, Jules Vallès publie ses Souvenirs dans le quotidien Le Cri du peuple. Son récit complète Le Bachelier, qui parut en 1881, et anticipe L’Insurgé définitif, qui paraîtra après sa mort. Le grand écrivain et journaliste, le chantre de la Commune de Paris, y relate l’éducation politique d’une génération, celle qui eut vingt ans entre 1848 et 1851.


Souvenirs d’un étudiant pauvre
Jules Vallès, Éditions Libertalia, 170 pages, 10 euros