Intense texte philosophique de Georges Bataille sur l’amour et la communauté des amants, écrit en 1951 pour la remarquable revue internationale de littérature Botteghe Oscure, animée à Rome, de 1948 à 1959, par Marguerite Caetani.
« L’Être aimé dans ce monde dissous est devenu la seule puissance qui ait gardé la vertu de rendre à la chaleur de la vie. Si ce monde n’était pas sans cesse parcouru par les mouvements convulsifs des êtres qui se cherchent l’un l’autre, s’il n’était pas transfiguré par le visage "dont l’absence est douloureuse", il aurait l’apparence d’une dérision offerte à ceux qu’il fait naître : l’existence humaine y serait présente à l’état de souvenir ou de film des pays “sauvages”.
Il est nécessaire d’excepter la fiction avec un sentiment irrité. Ce qu’un être possède au fond de lui-même de perdu, de tragique, la "merveille aveuglante" ne peut plus être rencontrée que sur un lit. Il est vrai que la poussière satisfaite et les soucis dissociés du monde présent envahissent aussi les chambres : les chambres verrouillées n’en demeurent pas moins, dans le vide mental presque illimité, autant d’îlots où les figures de la vie se recomposent. »