« Savoir ce que l’on sait et ne pas percevoir comment, peu à peu, l’on sait, sera la marque chaque fois plus évidente de la culture et de l’éducation moderne »
Dans cet essai d’une logique rigoureuse, Agustín García Calvo analyse le phénomène d’écrasement des traditions autonomes et collectives qu’opère le mouvement de l’histoire dans ses phases successives.
La tradition s’incarne sous la forme d’une mémoire intuitive, pratique et créative, tandis que l’Histoire enracine son avancée par un mouvement d’abstraction de la vie.
Le lecteur est ainsi convié à percevoir sensiblement, jusqu’en lui-même, la lutte dialectique entre la dynamique historique de destruction et les élans immémoriaux de vie et de résistance qui demeurent malgré tout.
Conjuguant pensée et poésie, cet ouvrage fait émerger une définition de la tradition dégagée de tout relent nationaliste et faisant écho aux luttes sociales et politiques actuelles.
Agustín García Calvo (1926-2012) est un auteur espagnol prolifique, philologue, linguiste, poète, dramaturge et essayiste. Cet anarchiste éclectique, toujours sur la brèche (il participait encore au mouvement des Indignés quelques mois avant sa mort), se veut le porte-voix des gens communs. Traduit en français, son précédent livre La Société du Bien-être (éd. Le Pas de Côté).
En Marge de l’ouvrage :
« La pensée comme arme » de Miguel Amorós
Pour expliquer ces deux phénomènes — l’Histoire et la tradition —, Agustín décrit deux types de mémoire, l’une visuelle et photographique, qu’il met en lien avec le premier ; l’autre, souterraine et séquentielle, en rapport avec le second. Cette dernière nous rapprocherait de la figure du « ça », l’océan psychique postulé par Freud et Groddeck, ou à celle de l’« inconscient collectif », le lieu selon Jung où s’accumulent les expériences ancestrales de l’humanité et s’élaborent les mythes qui font irruption dans la conscience par la porte des rêves et des visions.