En France, chaque année, 75 000 femmes sont violées par des hommes et 200 000 subissent des violences conjugales physiques ou sexuelles. 150 sont tuées par leur partenaire ou ex-partenaire, soit plus d’une tous les trois jours. Pourtant, la prévention des agressions reste un pan complètement négligé de la politique de lutte contre les violences. En effet, celle-ci se concentre sur l’après-agression : numéros d’urgence, dépôts de plainte, procès, prise en charge psychologique des victimes,… avec des résultats peu probants.
Mouvement qui a accompagné les luttes féministes dans plusieurs pays dès les années 1910, l’autodéfense reste fort méconnue alors qu’elle constitue un espace de partage d’outils variés qui permet de renforcer les capacités de toutes à se défendre, mais aussi de se reconstruire suite à des agressions vécues. Ce texte percutant et documenté propose de revenir sur l’histoire de ce mouvement et de voir comment il s’est redéployé ces dernières décennies en France et en Belgique grâce au travail de formatrices engagées qui, via une dizaine d’associations, proposent des stages adaptés à toutes. Les chapitres sont entrecoupés de paroles directes de femmes d’origines, d’âges, d’orientations sexuelles et capacités très diverses, qui racontent les transformations que l’autodéfense pour femmes a apporté dans leur vie.
Alors que la notion d’« intersectionnalité » est aujourd’hui violemment combattue de toutes parts, l’ouvrage montre qu’une approche intersectionnelle de l’autodéfense permet une attention aux diverses réalités vécues par les femmes selon qu’elles soient jeunes ou plus âgées, valides ou en situation de handicap, de classe populaire ou plus riche, ciblées par le racisme ou non…
La méthode ? Apprendre à oser se mettre en colère, se donner le droit de se défendre, se protéger, quelle que soit la situation et ce, sans avoir besoin de cran d’arrêt, de gazeuse ou d’être ceinture noire de kung-fu. L’autodéfense féministe couple en effet de l’autodéfense mentale à l’apprentissage de ripostes verbales et physiques : un cri, un regard, un mot, un mouvement, permettent souvent de modifier le scénario.
Un apprentissage puissant et émancipateur auquel toutes les femmes devraient avoir accès.
Mathilde Blézat est journaliste et autrice, membre de la revue Z depuis 2012, co-fondatrice de la revue Panthère Première et co-autrice de l’ouvrage « Notre corps nous-mêmes » (février 2020, éditions Hors d’Atteinte). Elle est militante féministe depuis plus de 15 ans.