L’originalité du livre porte ici sur sa localisation, Madrid. Car si le mouvement libertaire dans cette période a fait l’objet de nombreux ouvrages, rares sont ceux qui ont visé la capitale de l’Espagne.
Pourquoi ce déni ? Une des raisons majeures tient au fait que, tout au long du XXe siècle, la Confédération nationale du travail (CNT) joua dans la capitale un rôle peu important, bien en retrait de la centrale socialiste, l’UGT, pendant la Guerre civile, ou, à la fin du siècle, des Commissions ouvrières proches du PCE.
L’auteur montre la force et la diversité des athénées, des collectifs et comités de quartier qui animèrent la capitale et fomentèrent des luttes pendant toutes ces années. Il décrit avec précision la forces et les grandes faiblesses de la CNT traversée par ses difficultés à faire coïncider présent et passé, exil et intérieur.
L’auteur, et c’est là un apport important de son travail, approfondit l’action isolée, certes, mais importante du mouvement libertaire contre la répression. Face à l’extrême droite, qui visait toute la gauche radicale, et les forces de police, qui le visaient en particulier, le mouvement libertaire sut créer un mouvement anti-répression venant en aide aux prisonniers politiques et de droit commun. Cette solidarité active marqua sa force et son originalité, puisque, dans cette lutte, il ne fut épaulé que par la gauche radicale. Ce développement majeur du mouvement libertaire qui irrigua toute la ville eut des conséquences impressionnantes sur la centrale syndicale.
Mais pendant la Transition le mouvement libertaire madrilène, à l’inverse de la centrale anarcho-syndicaliste, connut un réel essor à l’image de ce qui se passa dans toute l’Espagne.
Gonzalo Wilhelmi Casanova, docteur en histoire contemporaine, est un spécialiste du mouvement libertaire espagnol, notamment pendant la Transition (1975-1982). Il s’est aussi intéressé aux victimes de la violence politique en Espagne à la fin du franquisme et au cours du post-franquisme.