Il s’appelait Ignace Reiss, Steff Brandt, Hans Eberhardt et quelques autres noms d’emprunt rendus nécessaires de par son activité : agent des services secrets de l’Armée rouge.
Sa femme, Elisabeth Poretski, raconte l’histoire tragique de cet homme, né sous le nom de Nathan Markovitch Poretski, espion soviétique influent en Europe jusqu’à sa rupture avec Staline en 1937.
Celui qui dans son ultime lettre au « Petit père des peuples » revendiquait un autre socialisme, plus authentique, fut retrouvé assassiné un mois plus tard, en août 1937, dans une rue de Lausanne. Une mort orchestrée par les siens.
Le récit historique que relate Elisabeth Poretski montre quelle fut la vie de cet homme et de ses proches, qui ont longtemps cru en leurs idéaux avant de les voir dépérir devant leurs yeux. Les nôtres évoque les enjeux d’une époque, pas encore révolue, marquée par l’affrontement idéologique de deux blocs qui se mettent en place.
Victor Serge, dans un puissant hommage, voyait dans cet épisode historique un élément avant-coureur de « la sanglante corruption du régime stalinien [qui] gagne le mouvement ouvrier et les intellectuels avancés d’Occident ».
Elisabeth K. Poretski est née à Kolomya (à l’époque ville polonaise, aujourd’hui située en territoire ukrainien) en 1898 sous le nom d’Elsa Bernhaut. Elle a étudié la médecine à l’Université de Varsovie. Elle épouse Nathan Markovitch Poretski (plus connu sous le nom d’Ignace Reiss) en 1920 à Moscou. Le couple a vécu à Berlin en 1933, année de l’incendie du Reichstag, puis ce sera Paris. En 1937, suite à l’assassinat de son mari, Elisabeth Poretski se voit contrainte de prendre la fuite pour les États-Unis, avec leur fils de 12 ans. Elle deviendra, après la Seconde Guerre mondiale, professeure de philologie et littérature slave à l’Université de Colombia de New York. Elle demeurera dans cette ville jusqu’à son décès en octobre 1978.
Traduction Olivier Simon
Préface de Jorge Semprún
Postface d’Alexis Bernaut