« Un océan remué dans toutes ses vagues », avec cette formule l’anarchiste Neno Vasco cherchait à définir la conception pluraliste de l’unité ouvrière embrassée par le syndicalisme révolutionnaire qui féconda la stratégie ouvrière d’action directe du premier mouvement ouvrier brésilien, du début du siècle jusqu’à la fin des années vingt.
Sa richesse et sa dynamique s’imprimèrent et s’exprimèrent dans les pratiques ouvrières (grèves, sabotages, boycott, ligues de quartier...), dans l’imaginaire social (l’image de l’apathie s’impose pour représenter le prolétariat du pays) et dans le « ton anarchiste » de toute cette époque.
Les années vingt sont celles d’un changement profond, d’une rupture dans le mouvement ouvrier brésilien. Ce parcours vers la rupture, dont la portée sans aucun doute est internationale, n’est nullement celui de l’accommodement, ni de la conciliation, ni de la continuité. Pas de place ici pour l’image traditionnelle et trompeuse de l’histoire du Brésil : cette histoire douce, sans conflits, où l’on marie continuellement l’eau et le feu.
Si, d’une part, la rupture des années vingt implique la création d’une nouvelle stratégie ouvrière et le replacement du mouvement ouvrier dans la société, elle est d’autre part, oubli.
Jacy Alves de Seixas, docteur en histoire à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) à Paris, est actuellement Professeur à l’Institut d’Histoire de l’Université d’Uberlândia et chercheur au C.N.Pq (Conselho Nacional de Desenvolvimento Científico e Tecnológico, au Brésil).