En exil à Londres après 1871, condamné à mort par contumace pour avoir participé activement à la Commune de Paris, Jules Vallès s’invente un double, Jacques Vingtras, dont il raconte l’enfance.
Voilà comment la censure, paradoxalement féconde, aura fait accoucher Vallès d’un chef-d’œuvre du roman autobiographique en le privant d’une expression directe de la révolte. L’exigence politique n’a cependant pas disparu : elle sous-tend une révolution stylistique et narrative. Car la force critique de L’Enfant tient à cette forme inédite qui, par un emploi dynamique du présent, prête voix à l’enfant sans voix pour mieux raviver la mémoire d’un corps assoiffé de liberté.
Rien de pathétique, dès lors, dans ce récit d’une enfance malheureuse : Vallès fait rire d’un discours parental, social et culturel tout à la fois mis en scène et mis en pièces - comme il fait rire du « Moi » qui le subit. Par cet humour, il n’a pas fini de nous atteindre.